Plage, glaces et requins
4 exemples* simples pour bien comprendre les statistiques et briller en société !
Temps de lecture estimé : 4 minute
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Une étude scientifique a montré que lorsque le nombre de ventes de glaces augmentait, le nombre d’attaques de requin aussi : c’est ce qu’on appelle une association significative. Faut-il pour autant stopper (ou réduire) la vente de glaces ? Non en fait, deux variables peuvent être significativement associées, mais l’implication peut se faire via une troisième. Ici par exemple ce n’est pas parce le nombre de ventes de glaces augmente que le nombre d’attaques aussi ! La véritable causalité c’est bien l’augmentation du nombre de personnes à la plage (qui par ailleurs achètent des glaces) qui induit une augmentation du nombre de baigneurs exposés et donc des attaques de requins.
En été, le risque d’attaque de requins est augmenté de 80% ! C’est énorme selon vous ? Imaginons qu’en temps normal, le risque d’être attaqué par un squale sur cette plage soit de 0,000001 (soit une chance sur 1 million). En été, une augmentation de 80% du risque revient à multiplier ce risque initial par 1,8 et nous donne donc un risque à 0,0000018 (soit moins de 2 chances sur 1 million de se faire attaquer par un requin). Alors ? Plage ou montagne cet été, je vous laisse apprécier les risques !
Supposons qu’il y ait eu 1040 attaques de requins sur cette plage en 20 ans. Ça fait donc 52 par an, une par semaine ! Il y a donc une attaque de requins sur cette plage par semaine !!! Terrifiant non ? En pratique, outre le fait que réduire l’information à d’autres unités de valeurs peut être anxiogène, la bonne démarche consiste plutôt à analyser les distributions des valeurs dans le temps. C’est par exemple comme ça qu’on a pu remarquer que sur les 1040 attaques en 20 ans, 80% s’étaient produites il y a plus de 10 ans, à l’époque où il n’y avait pas encore de filet de protection et que la plupart des attaques depuis, se produisent majoritairement entre novembre et décembre quand les eaux sont les plus chaudes.
Sur les 1040 attaques de requins en 20 ans, seulement 5% se sont produites à moins de 2 mètres du bord de la plage. Cet été, sur les 4 attaques, 2 se sont produites à moins de 2 mètres du bord, soit donc 50% d’attaques à moins de 2 mètres du bord et donc une variation de 900% ! Vous voyez le piège ? La validité d’un pourcentage calculé sur 1040 n’est pas la même que calculé sur 4 ! En réalité quand on compare deux pourcentages, il est impératif tenir compte des effectifs dont ils sont issus au risque de conclure à des augmentations faramineuses à tort ! Et ça c’est tout l’enjeu des statistiques !
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Six heures de matin, le réveil sonne. J’ai un volume de sonnerie hyper fort pour être certain de me réveiller. En un bond maîtrisé, je fais passer mes pulsations cardiaques de 65 à 100 bpm et j’extirpe frénétiquement mon corps semi-réveillé du lit. L’esprit encore embrumé par une nuit agitée d’angoisses professionnelles, je saute dans mon café et avale un pantalon (ou l’inverse). Après 30 minutes d’activités soignées que je ne peux décrire ici…RGPD oblige, je ferme la porte et me dirige vers la gare d’un pas mécanique. Casque vissé sur les oreilles, yeux rivés sur mes mails professionnels je tente de réduire au plus vite la distance qui me sépare de l’hypothétique siège assis, d’un hypothétique train qui devrait me recracher à Paris. Un coup de frein brusque me sort de ma bulle. Je me presse de rejoindre le trottoir et insulte copieusement le chauffeur qui vraisemblablement n’apprécie pas que je traverse ici. « Putain il fait chier, il va me faire rater mon train ce taré. Et des clous il y en nulle part de toute façon ! ». Énervé, je profite de cette adrénaline pour allonger le pas une notification venant de m’avertir que le train suivant serait supprimé. C’est par un sprint salvateur que j’arrive à défier le couperet des portes qui se referment. Ne parvenant à retenir l’inertie ainsi dégagée, je bouscule quelques usagers debout, avant de lancer mon classique « Avancez dans les couloirs s’il vous plaît ». Je passerai le reste du trajet debout, compressé de plus en plus à mesure que le ver de fer se rapproche de Paris. Je débarque enfin et me fraye un passage à travers cette marée humaine. « Pardon, excusez-moi ». Pfff…ils n’ont toujours pas compris que les escalators c’est comme les autoroutes. « Tenez votre droite bon sang ». Métro bondé…je ne vais pas pouvoir laisser descendre sinon je ne monte plus. Bon on s’entasse, on pousse un peu. Après tout, je paye mon abonnement moi aussi. Enfin, je suis levé depuis 1h45, me voici arrivé au travail dans une humeur de chien...
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Les salariés ont tous eu à un moment donné de leur vie professionnelle à répondre à un questionnaire. Aujourd’hui, leurs perceptions quant à ce type de collecte de données sont assez mitigées :
« Chouette on s’occupe enfin de nous, on va pouvoir dire ce qu’on pense »
« Pfff...encore un questionnaire, c’est le troisième et je n’ai toujours pas vu une seule action »
« 110 questions ? Ils ont fumé ou quoi, j’ai pas que ça à faire ! »
« Pas question que j’indique mon statut, mon manager va tout de suite savoir que c’est moi »
« 100 questions pour un temps de remplissage estimé de 5 minutes. Mouais…»
« Il est validé votre questionnaire ?!? »
Si les exemples cités ne sont pas exhaustifs, ils reflètent tout de même assez bien le désintérêt grandissant pour ce type de collecte de données en entreprises. Pourquoi ? Les salariés ont-ils peur de s’exprimer ? Non. Craignent-ils pour leurs données ? Beaucoup moins qu’hier, les réglementations étant aujourd’hui plus strictes (RGPD) et donc plus rassurantes pour les répondants. Rappelons par ailleurs que nous diffusons quasi quotidiennement nos données personnelles urbi et orbi avec assez peu de réticences (internet, objets connectés, réseaux sociaux…). Ils n’ont pas le temps alors ? Non plus. Quand on a le temps de répondre à sa belle-mère sur Facebook, ou d’envoyer un texto à son voisin pour qu’il vérifie que la porte est bien fermée, on peut prendre dix minutes pour répondre à un questionnaire…Bon sang mais pourquoi donc mon taux de participation à cette nouvelle enquête est-il si pourri ?! La réponse est simple : dans l’esprit des salariés, les questionnaires, ça ne sert plus à rien !
Essayons de comprendre pourquoi les salariés pensent cela. Ces 30 dernières années, les sujets questionnés en entreprise étaient suffisamment importants (parfois graves) pour nécessiter la mise en place de questionnaires validés scientifiquement, mais souvent lourds, longs, et parfois même ennuyeux. C’était en effet une condition nécessaire pour fédérer les acteurs autour d’un langage et des valeurs (chiffres) communs. Ce faisant, il a fallu par la même occasion intégrer des méthodes d’analyses statistiques classiques, mais néanmoins complexes à comprendre. Ce qu’il s’est passé, c’est que la quantité d’énergie que les acteurs de santé (pilotes des études au sein des entreprises) ont dépensée pour comprendre ces questionnaires, sa méthode d’analyse ad hoc, et expliquer / interpréter les rapports (parfois tellement longs) fut considérable. Il ne restait alors à ces acteurs presque plus de « batterie » pour pouvoir transformer leurs résultats complexes en restitutions claires, pédagogiques et opérationnelles, et en faire de magnifiques supports pédagogiques à diffuser au sein de l’entreprise. Je ne parle pas des réunions autour des « actions à mener » qui ont été souvent vaines, faute d’interprétations consensuelles des résultats. Finalement, les très faibles retours concrets de ces évaluations quantitatives ont largement découragé les salariés à prendre part aux questionnaires suivants.
Évidemment, on ne peut pas pour autant abandonner les démarches d’évaluations quantitatives en entreprise. D’abord parce que l'évaluation quantitative est un axe incontournable de toute démarche de prévention de la santé au travail. Quand on va chez le médecin par exemple, on mesure régulièrement les indicateurs clés (tension, poids, température…) avant de passer au questionnement plus qualitatif. Ensuite car ce sont des outils d’aide au diagnostic qui permettent de fixer un socle commun de discussion, d’orienter les phases qualitatives, et de lancer les pistes de réflexion sur la base de valeurs chiffrées robustes et partagées par les acteurs. Mais comment faire alors pour que les questionnaires retrouvent leur place dans ces démarches de prévention ? Plusieurs pistes :
La première, il faut alléger les questionnaires. Il faut trouver un juste équilibre entre validité scientifique et efficacité. Terminés les questionnaires à 120 items, même si la science le préconise. Terminés aussi les critères de segmentation à la Prévert, même si le comité de pilotage le souhaite parce qu’il veut des résultats pour cette équipe de 7 salariés ! Globalement, il faut sortir de l’angoisse récurrente des co-concepteurs de questionnaires qui se disent « je ne veux pas passer à côté de ci, il faut aussi que je mesure ça ». L’évaluation quantitative est une « approximation chiffrée d’un phénomène », en ce sens elle ne saurait en aucun cas être exhaustive ! Il faut donc être plus parcimonieux et ne récolter que le strict nécessaire (statistiques écologiques).
La temporalité maintenant…Une évaluation quantitative ponctuelle est beaucoup moins efficace en terme de prévention qu’un suivi ! Pourquoi ? Les études ponctuelles sont bien souvent menées suite à des événements ou des mécontentements, induisant d'abord un biais de situation qui a tendance à majorer les mauvais indicateurs, mais également une baisse de confiance des salariés qui ont alors l'impression de ne pas avoir été entendus puisqu'une étude quantitative est lancée pour confirmer leurs dires. Rappelons en outre, que ce qui compte le plus dans tout système de prévention, c’est la comparabilité dans le temps. Savoir que ma tension artérielle est aujourd’hui de 140/80 ne m’alerte pas forcément en terme d’actions de prévention à adopter. En revanche, si je tiens compte du fait que depuis 3 ans elle était en moyenne à 120/75, cela devrait m’inciter à manger moins salé (action) ! Bien-sûr et c’est du bon sens, si j’avais eu 165/90, même sans suivi, je me serai inquiété rapidement…
Les rapports, enfin…« On a trouvé un superbe prestataire, un peu cher, mais très compétent et très calé sur le sujet. On est ravis, sauf que le rapport fait 134 pages ! Il y a des graphiques et des tableaux dans tous les sens ». Là encore, la parcimonie est de rigueur, mais pas que. Il faut repenser la qualité au détriment de la quantité (ce n’est pas parce que le prix jour est élevé que votre rapport devrait être plus long). Il faut recentrer l’énergie de l’analyse autour des résultats saillants uniquement, les intégrer de manière pédagogique sous forme d'infographies et proposer un livrable court, synthétique et directement interprétable par l’ensemble des acteurs de l’entreprise. Un rapport difficilement approprié par les acteurs ne sera la plupart du temps jamais partagé et n’invitera que très difficilement à des réflexions autour d’actions éventuelles. Les salariés qui ont participé aux enquêtes verront alors, sans retours opérationnels, leurs attentes déçues et leur confiance en ce type d'évaluations diminuée.
Finalement, il ne manque pas grand chose pour que les évaluations quantitatives soient efficaces et poussent à l'action. Il faut simplement recentrer l'énergie autour de ces démarches. Ainsi, elles seront encore plus souvent couronnées de succès et répondront enfin aux attentes des répondants qui auront la véritable impression de participer à la co-construction d'un environnement favorable au sein de leur entreprise !
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Notre confiance en les statistiques n’a cessé de grandir au cours des siècles. Précieux outils pour synthétiser des quantités d’informations que le langage à lui seul ne pouvait résumer, les statistiques ont en effet offert à la science de formidables points de repères, permettant à partir d’observations ou de constats mesurés, de synthétiser les phénomènes observés, de les rendre consensuels entre les observateurs, et d’explorer alors un ensemble d’hypothèses explicatives de ces derniers. Ainsi a-t-on pu établir un nombre important de recommandations, en particulier dans le domaine de la santé : fumer augmente le risque de cancer du poumon, faire du sport diminue le risque de troubles cardiovasculaires, boire un ou deux verres de vins par jour…ah non zut…avec le vin ça ne marche plus ! Comme tout outil qui a prouvé son efficacité, les statistiques ont donc tout naturellement été adoptées par le grand public, et font aujourd’hui partie intégrante des informations dont chacun aime s’abreuver au quotidien. Comme par ailleurs, la plupart de ces statistiques sont issues d’articles ou de rapports scientifiques, il n’est nul besoin dans la conscience collective d’en douter et chacune d’entre elles est donc ingérée aujourd’hui en pleine confiance.
Et pourtant, la diffusion tout venant de ces statistiques est aujourd’hui souvent biaisée et excessivement alarmante, et ce pour deux raisons. La première vient de la vulgarisation des articles scientifiques dont ces statistiques sont tirées. En tant que lecteurs, nous avons rarement le temps ou l’envie de lire intégralement un article ou un rapport scientifique et il convient donc à ceux qui nous rendent ces statistiques accessibles (les rédacteurs), d’en extirper en quelques phrases seulement la substantifique moelle, sacrifiant par la même occasion une quantité d’informations essentielles pour en capter le pleine compréhension (je ne parle pas ici de certaines pratiques qui consistent à dramatiser les manchettes de certains articles sur le web pour en renforcer l’attractivité). Le second biais vient du fait que ces statistiques reposent souvent sur une analyse simplifiée d’un seul facteur (si tu fais ceci, tu augmentes ton risque de cela), alors que le risque par définition est multifactoriel. Si manger trop salé augmente mon risque de troubles cardiovasculaires (c’est une étude qui l’a dit !), qu’en est-il si par ailleurs je fais du sport ? Si j’ai une pression artérielle plutôt basse ? Si je bois deux verres de vin par jour ? Et si je suis en plus stressé(e) parce que je travaille trop ? Et si dans ma famille il y a des antécédents de troubles cardiovasculaires ?...Zut, je fais comment si je veux adopter une approche de prévention ? Je me prive de tout dès qu’une statistique me dit qu’il ne faut plus faire ça ? Et j’arrive à 60 ans avec des problèmes autres que cardiovasculaires ? M’enfin…
En réalité, il est quasiment impossible de quantifier avec exactitude, en fonction de nos comportements au quotidien, le risque global encouru sur notre santé. Comme je vous le disais, celui-ci est multifactoriel. Alors comment faire si l’on veut agir, ajuster nos pratiques, conserver un niveau de risque convenable ? Il suffit simplement de replacer l’information parmi l’ensemble des autres pratiques sans forcément tenir compte de la valeur brute et alarmante de la statistique. Fumer tue, il faut que je réduise ma consommation si je suis concerné(e). Boire beaucoup augmente le risque de cancer de la gorge, du foie, il faut que je réduise si je suis concerné(e). En somme, prendre en compte cette foultitude de statistiques dans une approche préventive consiste simplement à ajuster ses comportements si vous jugez que vous êtes concerné(e) et si cela vous semble nécessaire, tout en gardant un œil régulier sur l’équilibre optimal (continuer à gérer les autres facteurs) qui vous permettra de repousser au mieux l’ « ultime échéance » qui je vous le rappelle, arrivera dans 100% des cas !
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Depuis le 25 mai 2018 est entrée en vigueur la Réglementation Générale pour la Protection des Données (RGPD...ça en jette hein ?). Si le principe est fort louable en matière de renforcement de la protection des données individuelles (portabilité des données, majorité numérique, droit à l'oubli...), cette nouvelle réglementation n'en demeure pas moins un non sens dans la pratique, tant pour les collecteurs de données que pour les individus eux mêmes. Explications…
Du côté des entreprises : l'usine à gaz
Je ne vous resservirai pas le refrain de l'augmentation des tâches administratives au sein des entreprises (je ne parle pas du prélèvement à la source hein…), mais là où une simple déclaration à la CNIL (pour le traitement d'un jeu de données) pouvait prendre auparavant une vingtaine de minutes, c'est désormais un peu plus de paperasse que les entreprises doivent gérer pour se conformer à cette nouvelle réglementation. Outre la mise en conformité interne (pour les données de leurs propres salariés), les entreprises qui collectent des données doivent désormais cartographier les différents traitements réalisés. Jusque-là rien de plus simple, il suffit de tenir à jour un simple registre de quelques dizaines de colonnes. Mais ce n'est pas tout. Il faut également identifier les actions complémentaires à mener pour se conformer aux obligations et vérifier par la même occasion que les éventuels sous-traitants connaissent eux aussi leurs nouvelles obligations. Donc, clauses et accords de confidentialité à rédiger et à faire signer pour chacun des prestataires. Mais ce n'est fini. Dans le cas de traitements de données personnelles qui sont "susceptibles d'engendrer des risques élevés", il est fortement recommandé de mener une analyse d'impact sur la protection des données (PIA...ça en jette moins là). Et là, c'est le drame numérique...Pour nous accompagner dans cette analyse, nous nous voyons proposer un merveilleux logiciel. Merveilleux produit de technologie, nécessitant (si l'on veut être rigoureux) des allers-retours incessants entre les différents acteurs du traitement pour i) remplir , ii) amender et iii) valider. Le tout bien évidemment dans une application très conviviale (si je vous assure) et "user-friendly". M'enfin…Si le fait de responsabiliser un peu plus les entreprises sur le traitement des données personnelles me semble une excellente chose, les obligations et moyens proposés pour y parvenir me semblent tout de même à ce stade quelque peu disproportionnés. Par ailleurs, le temps passé à cette mise en conformité n'invitera sûrement pas les entreprises concernées à se poser la véritable question : "Comment pouvons-nous ajuster nos pratiques pour respecter un peu plus les données d'autrui ?"
Du côté des utilisateurs : le stress digital !
Depuis l'entrée en vigueur de la RGPD, nombreux sont les mails que nous avons tous et toutes reçus (voir avec la Belgique si on doit accorder ou pas) de nos partenaires nous informant que nos données personnelles étaient déjà utilisées pour des e-mailing commerciaux de masse, mais que dorénavant nous avions le droit de refuser de faire partie de ces envois massifs (c'est gentil de demander maintenant !). Evidemment le mail d'information était plus souple :-). Ce sont donc des dizaines de mails qui sont venus gonfler nos boites mails qui, avant l'été se trouvaient fort dépourvues. Parfait tout ça pour notre qualité de vie au travail et notre stress digital. Pire, il ne se trouve pas un site internet aujourd'hui sur lequel nous ne pouvons surfer sans voir apparaître au préalable le fatidique message "Le respect de votre vie privée est notre priorité […] cliquez sur j'accepte pour continuer votre navigation". C'est tellement fluide comme navigation 4.0...Imaginez que vous entrez dans une boulangerie pour acheter ce pain au chocolat (chocolatine ?) qui vous a fait de l'œil dans la vitrine et que la boulangère vous demande : "Acceptez-vous que dans le cadre de la RGPD je me souvienne de votre visage pour vous proposer des viennoiseries personnalisées lors de votre prochaine visite?" Bref, ce n'est pas en tous les cas en faveur de la fluidification du surf ! Pire, ça peut agacer à force, voire nous stresser digitalement ! N'aurait-il pas été plus judicieux de faire accepter les conditions aux surfeurs en une seule fois via un seul site d'entrée (on accepte les conditions sur la plage avant d'aller surfer) et de demander à l'ensemble des éventuels sites collecteurs de données de se conformer à la réglementation au travers de cet unique site (une fois dans l'eau, je vais surfer où je veux vu que les sites où je peux aller sont en conformité) ?
Adoptons une attitude data-responsable !
En vérité, plus que des contraintes collectives et/ou individuelles, cette nouvelle réglementation pose d'abord (encore) le problème des responsabilités des uns et des autres. Si je décide d'aller surfer, je dois (en tant qu'individu) être conscient que je peux courir certains risques en fonction des sites sur lesquels je me rends et des données que j'expose. Certains sites de surf regorgent par exemple de beaucoup plus de requins (du web) que d'autres. En outre, il en va également de ma responsabilité de ne pas étaler l'intégralité de mes données sur le web. Mais cette réglementation incite également les individus à se retrancher derrière : ce sont les collecteurs qui doivent pendre des mesures, donc pas besoin de prendre des palmes pour aller surfer...la RGPD veille ! Du côté des collecteurs de données, la mise en conformité est une sorte d'aval juridique pour disposer des données comme bon leur semble sans se poser les véritables questions d'éthique numérique. C'est donc une très mauvaise prévention, comparable certaines (pas toutes) réglementations en santé au travail qui incitent les entreprises à se retrancher derrière des obligations légales et à ne pas agir pour la santé au travail.
Si sur le fond, la RGPD est une avancée certaine pour la protection de nos données individuelles, elle n'en demeure pas moins complexe à mettre en œuvre dans la pratique. De plus, elle n'incite pas à changer nos pratiques tant au niveau des individus que des entreprises. Qui plus est, elle participe activement au stress digital de l'ensemble des individus et ne favorise pas l'attitude digi-reponsable que nous devrions tous et toutes avoir, que l'on soit employeurs, salariés ou simples surfeurs. Pensons-y !